Portrait Alice Gautreau                                Couv seuls les poissons morts suivent le courant éd Pygmalion

 

Alice Gautreau est sage-femme pour Médecins sans frontières. Elle raconte son parcours incroyable dans son livre Seuls les poissons morts suivent le courant paru aux éditions Pygmalion.

https://www.editions-pygmalion.fr/Catalogue/hors-collection/documents-et-temoignages/seuls-les-poissons-morts-suivent-le-courant

 

Voici un site qu’elle affectionne tout particulièrement : www.sosmediterranee.fr

 

 

J’ai rencontré cette jeune femme rayonnante à l’hôtel Renaissance Paris Arc de Triomphe. Sa joie de vivre, sa simplicité et son authenticité m’ont séduite. Je la remercie d’avoir accepté mon invitation et de sa spontanéité. Sa passion pour son métier lui confère une personnalité empreinte de fraîcheur et de combativité. Elle est mon invitée des « Rencontres féeriques » de cette semaine. Chaque jour, découvrez une partie de notre échange.

 
 

Sage-femme pour Médecins sans frontières, vous avez décidé de raconter votre histoire. Vous parlez beaucoup de votre expérience à bord de l’Aquarius. Est-ce cette mission-là qui a été le déclic pour écrire ce livre ?

J’ai commencé sur l’Aquarius le 10 mai 2017. Il me semble que dès le 22 mai, on faisait mon 2ème sauvetage où on avait recueilli plus de 1000 personnes à bord. L’Aquarius est un navire qui ne peut accueillir que 600 personnes. On était vraiment submergé. On était en route vers le nord, vers l’Italie et on a appris que nos collègues d’un autre navire d’ONG venaient de repêcher une trentaine de corps. J’étais un peu indignée toute seule dans ma cabine, bien triste et j’ai envoyé un message à Guillaume Meurice (humoriste, chroniqueur sur France Inter) en lui demandant de faire des blagues sur la situation. Je pense que la légèreté et l’humour peuvent toucher beaucoup de gens alors que parler de choses sérieuses d’un ton sérieux finit peut-être par les lasser.

 

Ça leur fait peut-être un peu peur aussi ?

Oui ça fait peur et ça ennuie les gens car ils en ont marre d’entendre tout le temps des mauvaises nouvelles. Je pensais qu’on pouvait peut-être attirer l’attention parce qu’il y en avait vraiment besoin. Guillaume Meurice m’a répondu dans la demi-heure qu’il était partant. Dans la foulée, j’ai fini mon sauvetage, on a fait le débarquement, tout s’est bien passé. Et on a enregistré la chronique qui a été diffusée le 29 mai dernier. Suite à cette chronique, la directrice éditoriale de chez Pygmalion m’a envoyé un petit message m’expliquant qu’elle avait très envie de publier mon histoire. Je lui ai répondu que je ne savais pas écrire. J’ai eu un blog mais je l’écrivais en anglais. Parler de mon métier en français est nouveau pour moi et je lui ai dit que je ne me voyais pas écrire un livre. Elle m’a proposé de trouver une co-auteure, le temps est passé et l’univers m’a envoyé cette co-auteure que nous recherchions. Margaux Duquesne m’a écrit pour me demander de faire un portrait sur la sage-femme de l’Aquarius, moi à l’époque. J’ai parlé d’elle à mon éditrice, Florence. Lors de notre rencontre tout s’est bien passé et on a fait plein de longs entretiens pour écrire le livre. Elle m’a posé un tas de questions que je ne m’étais jamais vraiment posées. Elle a écrit la plupart des mots, je relisais, je rajoutais ce que j’avais oublié de dire, je reformulais certaines choses et le livre est né.
 
C’était un peu une forme d’introspection ce travail à deux ?

Complètement. C’était un retour sur ce que j’avais fait. Elle me demandait toujours pourquoi t’as fait ça ? Et en fait je n’avais jamais pensé à ces questions-là parce que les choses sont arrivées ainsi. On prend la vie comme elle vient. Ces échanges étaient un peu une thérapie.

 

Quelle expérience retenez-vous de votre mission à bord de l’Aquarius ?

C’était une mission d’une extrême humanité. Le souvenir que j’ai, c’est un sentiment de chaleur. J’étais avec des gens que je n’aurais probablement jamais rencontrés dans la vraie vie. Ils étaient marins, architectes navals, travaillant dans le marketing. On n’était que quatre médicaux à bord, eux j’aurais pu les rencontrer, mais c’est vrai qu’une sage-femme sur un navire c’est très rare. C’était un monde très nouveau et toutes ces personnes étaient à bord pour une même cause, une même raison : sauver des vies et restaurer la dignité humaine des gens qu’on avait secourus. C’était très important car ça donnait une dynamique au groupe qui était immédiatement très lié, un peu comme une famille.
 
C’est aussi une forme de partage finalement ?

Oui.
 
Quel sens donnez-vous à ce mot ?

Le partage c’est un don de soi, un don de choses qui nous appartiennent mais finalement est-ce que les moments nous appartiennent vraiment ? Je ne sais pas en fait. Je pense que c’est de mettre en commun les choses qui auraient pu nous être propres et leur donner plus de valeur. Vivre ces moments-là toute seule, ça n’aurait pas été aussi intense et satisfaisant. Ça donne une énergie à la vie.

 

Découvrez la suite demain…

 

 

Valérie Motté

"AVEC NOS PENSÉES NOUS CRÉONS LE MONDE" BOUDDHA

Copyright : Valérie Motté

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