Jacques, vous venez de traverser une épreuve qui a bouleversé votre vie, votre quotidien… Comment l’avez-vous accueillie ?
Notre vie est sans cesse vouée à l’émerveillement ou au découragement suscité par certains évènements. Cette fragilité de l’existence nous rend la vie précieuse. Aujourd’hui, je vis l’épreuve de la maladie. Elle m’a privé de ma parole. C’est un immense encombrement, car je sens que nos mots ne font plus partie du même langage. Ce sont les gestes, les quelques écrits, et surtout le regard qui m’aide à me faire comprendre. Le plus difficile, ce qui me manque le plus, c’est de ne pas pouvoir dire de mots tendres à mes proches, des paroles encourageantes à mes lecteurs. Quel parcours que de venir à ma rencontre dans ce silence… et d’entendre les mots que je veux exprimer ! Merci à vous, chacune et chacun de m’accueillir.
Merci pour tout cet amour que je reçois, que j’accueille précieusement.
Quelles ont été les étapes pour transformer ceci ?
J’ai eu besoin du temps pour apprivoiser cette nouvelle étape de mon existence. Dans les tâtonnements vers les limites imposées par la maladie, j’ai dû affûter mon écoute, accepter d’entendre les éventuels sens que je pourrais lui attribuer, afin de mieux me responsabiliser face à cette épreuve.
À ce jour, j’accorde plus de liberté à chacun de mes ressentis afin de trouver mes forces, les canaliser et les utiliser à bon escient, pour que ce changement une fois accepté, puisse être accueilli et qu’il devient créateur de plus de Vivance en moi. Des projets de vie se construisent, les idées s’accrochent pour parvenir à leur réalisation. Je vis. Je me donne le plaisir de prendre soin de la graine de vie reçue en cadeau à ma naissance. Elle est encore là, bien précieuse et demandeuse de la préserver.
Pensez-vous que votre maladie avait un message à vous transmettre ?
J’enseigne que les maladies sont des langages métaphoriques, symboliques, avec lesquels nous tentons de crier et, dans le même temps, de cacher l’indicible, l’insupportable qui nous habite. C’est pour ça qu’il est difficile d’accéder au sens d’une maladie, puisqu’il est double et paradoxale.
Actuellement, j’ai l’impression de cohabiter dans une entente physique et psychique avec mon corps. Je suis attentif aux signaux qu’il m’envoie. Il vieillit, il me donne des signes de faiblesse, de vulnérabilité, de fatigue… C’est peut-être ce que je n’ai pas voulu entendre auparavant. J’ai foi dans la vie et je lui rends hommage à chaque jour nouveau qui s’ouvre à moi.
Quand on vous croise dans un salon, on retrouve votre si belle lumière et vos yeux pétillants. Quelle est votre force ? Votre secret ?
Je souris à la vie, à sa beauté et sa bonté vivante du moment présent.
Je suis dans sa grâce. Je suis dans l’amour.
Ce que vous appelez une force, pour ma part n’est pas du tout un secret, c’est l’aboutissement d’un travail sur soi. Un long cheminement intérieur durant lequel j’ai appris à m’écouter. Un périple qui m’a fait découvrir des ressources intérieures imprévisibles, m’a permis l’éveil, l’accès à certaines prises de conscience, m’a poussé à une remise en cause d’habitudes, de comportements ou de conduites, qui jusqu’alors m’enfermaient dans un personnage ou dans un système relationnel dominé par la gestion d’un quotidien parfois dévitalisé. J’ai perçu tout un éventail d’énergies, des vibrations, des pulsations de vie qui se répandent dans mon corps. Le résultat est semblable à une mise au monde, à une renaissance. Nous pouvons l’apercevoir chez certains hommes et femmes – il se nomme « beauté intérieure ». C’est elle qui va irriguer tout l’être entier. La complétude interne, le dynamisme affectif, la qualité de nos relations, vont être l’équivalent d’un humus tonique, vivifiant, qui embellit non seulement nos pensées et notre corps, mais toute notre façon d’être au monde.
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Copyright : Valérie Motté