Vous disiez que vous aviez beaucoup de textes, vous avez pensé écrire pour d’autres, vous l’avez peut-être déjà fait ?
Alors ça j’aimerais beaucoup parce qu’il y a des textes que j’écris, que je ne me vois pas interpréter, mais je n’ai pas encore fait le pas et je ne sais pas trop comment le faire non plus. À mon sens il me faudra peut être reposer le mot « interprète » et « chef de projet » pour donner plus de vie à se nommer auteur pour d’autres. J’ai vraiment envie pour le coup de glisser dans la peau de l’interprète pour aller plus loin dans ce mariage ou dans cette alliance que je vais glisser au doigt de l’autre. Mais pour ça, j’ai besoin de me désengager pour être plus universel pour d’autres en fait. Mais c’est un vrai cheminement que j’ai depuis quelques années, c’est une vraie envie justement parce que écrire c’est un vrai chemin de vie pour moi.
Comme vous disiez que l’écriture est un souffle, la créativité au sens large que représente-elle pour vous et quelle place a-t-elle dans votre vie ?
À mon sens, j’ai l’impression qu’elle prend énormément de place. Par exemple, on a beaucoup travaillé sur le livret, l’agencement, la mise en page. Au départ, je l’ai confié à un infographiste qui a été au bout de ses limites mais ça ne correspondait pas non plus à ce que je recherchais. Je me suis dit qu’il était peut être temps pour moi d’essayer de m’approprier l’ensemble de l’objet que je voulais. Le choix des photos m’a pris un peu plus de quinze jours parce qu’une photo exprime quelque chose et je voulais qu’elle ne dise pas exactement ce que dit déjà le texte mais qu’elle apporte une autre fenêtre dans la chanson pour prolonger le voyage. C’est aussi ça ma créativité, les mots ont quelque chose de très manuscrits mais aussi de très visuels. Je pense qu’il faut s’investir en tant qu’artiste notamment dans l’univers visuel, on ne fait pas que des chansons, on les fait vivre avec une photo, avec un logo, avec une police d’écriture… et c’est tout ce prolongement là que j’appellerais créativité. Presque un tout à 360°.
L’amour si cher à mes petites fées est très présent dans votre album et dès le début… Quel sens vous lui donnez ? Il est parfois galvaudé.
Je trouve qu’il est tellement galvaudé. Il y a une utilisation des mots, qui reste aujourd’hui essentiellement, au niveau de la séduction. On nous fait croire que l’amour c’est la séduction, c’est la tentation alors que ce ne sont que les premières phases de ce qui peut nous conduire à l’autre. À travers cet amour vers l’autre, un moyen, peut-être à nous apprendre à nous ré aimer et à nous aimer.
J’ai choisi de commencer par l’amour et par la douceur. Il y a des côtés positifs à ce choix-là et d’autres que je n’avais pas forcément envisagés mais je pense que mon disque nécessite du temps. Et puis l’amour aussi, ça prend toute une vie alors… C’est un thème qui est récurrent. Mon premier album s’appelle « l’ombre d’un premier amour » et c’est la continuité de ce chemin de pétales que j’essaie de semer pour que l’on marche dessus et que l’on se sente léger, que l’on se sente aimé.
Pour vous, ça a une place importante, on ne peut pas vivre sans amour ?
C’est sûr, on ne peut pas vivre sans amour.
Vous chantez « Rien n’est plus vrai que l’amour, on est plus grand et on est plus beau ». C’est pour votre fils ?
C’est pour mon fils mais dans quelques années quand il aura l’âge. C’est la continuité d’une première chanson qui s’appelle « lettre à Taïs ». C’est une chanson de mon premier album qui s’adresse à ma fille, pour le coup elle est toute petite et je me suis mis dans la peau de tous les pères face à ce si beau cadeau de la vie qui est un premier enfant et de surcroit une fille. J’ai essayé d’être le plus universel possible. Pour mon fils, je suis parti d’un triste constat. J’ai croisé un bon nombre de jeunes qui n’ont pas eu la chance d’avoir un père qui leur parle et je me suis dit, encore une fois, que cette chanson n’était pas réservée uniquement pour mon fils mais pour tous ceux qui se sentent fils et qui vont devenir des hommes. Et c ‘est vrai que rien n’est plus grand que l’amour et rien n’est plus vrai. Quand on aime, il n’y a plus d’efforts, quand on aime vraiment on peut tout pardonner. J’ai vu des enfants pardonner la maltraitance à leurs parents tout simplement parce qu’ils les aiment. C’est l’amour véritable. Cet amour-là nous dépasse et c’est ce que j’essaie de faire comprendre à mon fils.
Mais n’est-il pas important de s’aimer soi pour aimer l’autre ?
C’est sûr et il faut s’aider soi pour aider l’autre. S’aimer soi est un chemin parfois qu’on vit en miroir. C’est en apprenant à aimer l’autre qu’on revient en paix avec soi-même. Je me souviens que mon tout premier amour au collège, celui où j’ai vraiment senti que c’était fort, m’a appris à aimer ma différence, à aimer ma couleur de peau, à aimer mes origines, à aimer ma sensibilité quand tous les garçons cherchaient la virilité et se construisaient dedans. Moi au contraire j’ai complètement vibré, à ce que j’appelle la communauté – c’est un grand terme -, à cette sensibilité qu’ont les femmes.
Découvrez la suite de l’entretien demain…
Copyright : Valérie Motté