Est-ce le nombre important de burn out au travail qui vous a inspiré ce livre ?
Plus que l’importance des burn out, c’est la fréquence de l’émission de plaintes en lien avec son activité professionnelle qui m’a amenée à proposer au lecteur une réflexion sur sa vie professionnelle. Le burn out correspond à une définition très précise d’un état de santé en lien avec les conditions de travail. Si on en parle de plus en plus, ce n’est pas qu’ils sont plus nombreux mais qu’en en parlant, notamment dans les médias, ceux qui en souffrent ont pu identifier leur mal-être, consulter un médecin et se voir confirmer ce diagnostic. Le problème du mal-être au travail est beaucoup plus général et ne peut être rattaché uniquement au burn out.
Dans votre ouvrage, vous abordez les conditions de travail, leurs dégradations qui favorisent le stress, le harcèlement… Pouvez-vous développer ?
Le « travailleur », (je prends sciemment ce mot, car on ne peut se limiter au mot de « salarié », le monde du travail et ses difficultés concernent autant les travailleurs indépendants, les personnes qui sont à leur compte, les professions libérales, les chefs d’entreprises…), une grande majorité des travailleurs donc est soumise à une pression inhérente à leur travail. C’est inévitable : travailler c’est faire un effort pour produire un résultat.
Tant que nous savons gérer cette pression, tout se passe bien pour notre santé mais aussi pour notre moral (nos pensées et nos émotions). Mais si nous nous laissons déborder, ou si nous n’avons pas les moyens de faire face à la demande de notre tâche, nous perdons progressivement pied. Cela peut arriver dans différentes circonstances :
Je ne pense pas qu’on puisse parler d’une dégradation récente des conditions de travail. Je pense que ces mécanismes de fonctionnement existent depuis longtemps et qu’elles ont été amplifiées par un style managérial, où le travailleur était oublié au profit du rendement et des résultats de l’Entreprise. Aujourd’hui, les choses sont en train d’évoluer. Le management change. Si la performance des résultats reste l’objectif, les dirigeants commencent à comprendre que « presser » les salariés est contre-productif, car il se traduit par un fort absentéisme et une baisse de la qualité de ce qui est produit. Un nouveau concept est enseigné dans les grandes écoles de management : la bientraitance au travail.
C’est en assurant aux collaborateurs de meilleures conditions de travail que le résultat s’améliore. Cela passe par :
Bien sûr ces modèles sont encore minoritaires mais ils traduisent une conscience d’obtenir des résultats aussi performants, par une autre approche. Ils restent bien sûr à l’opposé des enseignes multinationales fortement marquées par le management américain avec une pression inhumaine.
Quant au harcèlement, les médias contribuent aujourd’hui beaucoup à leur dénonciation et à la conscience qu’il s’agit de pratiques qui ne sont plus de ce siècle. Sanctionnés pénalement, les décisions des tribunaux vont dans ce sens et confirment le contrôle qui se met maintenant en place sur ces abus.
Ce livre s’adresse aussi bien aux managers, aux chefs d’entreprises qu’aux salariés. C’était important pour vous ?
Bien sûr ! La pression et le mal-être sont présents à tous les niveaux de la hiérarchie. Le pouvoir de décision ne fait pas disparaitre les interrogations. Le poids des responsabilités est alors encore plus fort. Responsabilité envers l’ensemble des collaborateurs de l’entreprise dont l’emploi peut être remis en question par de mauvaises décisions. Mais responsabilité aussi envers des actionnaires qui attendent un rendement et des résultats.
En dehors du monde de l’Entreprise, le travailleur indépendant est lui aussi soumis à cette pression : responsabilité du médecin envers son patient, de l’avocat envers son client, du plombier par rapport à son chantier … Avec en plus l’incertitude des revenus qui seront gagnés dans les périodes à venir.
Qu’est-ce le stress finalement ? Il y a le bon et le mauvais, c’est bien ça ?
Il est très complexe d’expliquer le mécanisme du stress. Pour faire simple, disons qu’il s’agit d’un mécanisme de « mise en tension » de tout notre corps, pour nous permettre de faire face à un évènement auquel nous sommes confrontés. Ce mécanisme repose sur une action de certains organes de notre corps (hypophyse dans notre cerveau, glandes surrénales situées au-dessus de nos reins) qui réagissent pour nous aider à faire face à ce qui se présente à nous.
Dans un premier temps, il y a production d’adrénaline afin de nous permettre de passer à l’action pour nous dépasser et sortir plus vite de cette situation difficile (augmentation de notre rythme cardiaque, de notre respiration, et de notre concentration, meilleure acuité visuelle et auditive…). C’est-à-dire que le corps nous aide à nous « en sortir ». Si cela valait pour un homme des cavernes poursuivi par un ours, cela permet aujourd’hui de s’éloigner d’une situation dangereuse en prenant les bonnes décisions, de réussir un concours pour un étudiant, et en entreprise de modifier son organisation pour réussir la tâche à accomplir.
Tant que ce fonctionnement en surrégime de ces organes reste ponctuel, il n’y a pas de problème, car notre corps a la capacité de récupérer juste après. Nous pouvons alors parler de bon stress.
Mais le problème se pose lorsque cette mise sous tension dure trop longtemps, ou est récurrente, ou est d’intensité excessive. Dans ces 3 cas, notre corps est obligé de passer à la vitesse supérieure ce qui va le mettre en danger. De la même façon qu’un moteur de voiture, qui nous signale par le passage dans la zone rouge qu’il va y avoir un problème si on ne ralentit pas…
Les surrénales se mettent alors à rajouter à la production d’adrénaline, du cortisol. Or un apport trop important de cette hormone dans le corps peut entrainer des problèmes de santé importants. Nous parlons alors du mauvais stress.
Découvrez la dernière partie la semaine prochaine…
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